Bav[art]dages est de retour à la radio ! Pour la première de cette troisième saison, nous recevions le timbre-poste créé en 1974 par Joan Miró pour La Poste.
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LAETITIA : Bavartdages est de retour ! La série de l’été qui donne une voix aux œuvres d’art revient pour une troisième saison, et c’est toujours avec vous Julien Baldacchino… bonjour…
JULIEN : Bonjour Laetitia Gayet, bonjour à tous !
LAETITIA : Alors Julien, cette année il y a du nouveau dans Bavartdages… vous partez faire le tour du monde !
JULIEN : Exactement, je pars à partir de la semaine prochaine à la rencontre d’œuvres d’art tout autour de la planète !
LAETITIA : Et cette semaine vous êtes avec nous pour nous présenter une oeuvre qui vous suivra partout à travers ce périple… mais… je ne la vois pas…
JULIEN : Pourtant elle est bien là, c’est une oeuvre réalisée par Joan Miro en 1974. Bonjour !
LE TIMBRE DE MIRO : Bonjour !
JULIEN : Alors vous représentez…
LAETITIA : Non mais attendez Julien, elle est où cette oeuvre ?
JULIEN : Mais elle est là ! Sur la table !
LE TIMBRE DE MIRO : Coucou !
LAETITIA : C’est… un timbre ? Un timbre poste ?
JULIEN : Précisément ! Il s’agit de la plus petite oeuvre d’art que nous ayons jamais reçue dans Bavartdages… vous nous rappelez vos dimensions ?
LE TIMBRE DE MIRO : Je fais 5 centimètres 3 par 4 centimètres 8 !
JULIEN : Euh… on va peut-être rapprocher le micro par contre… vous dites ?
LE TIMBRE DE MIRO : 5,3 par 4,8 !
LAETITIA : Mais Julien pourquoi vous nous avez invité un timbre poste ? Je veux bien qu’il soit plus pratique à transporter, mais la toile originale c’aurait été mieux !
LE TIMBRE DE MIRO : Eh ! Mais je SUIS l’original !
JULIEN : Et c’est ce qui fait justement toute votre originalité : Miro vous a créé spécialement pour un timbre !
LE TIMBRE DE MIRO : C’est ça ! Joan m’a toujours raconté qu’il m’avait imaginé en sachant très bien que je ne serais pas plus grand qu’un timbre, même si ma maquette était un peu plus grande. Mais je n’ai jamais existé autrement pour le public que sur un timbre… et ça dès mon premier jour d’émission, je m’en souviens encore, c’était le 14 septembre 1974.
JULIEN : Et si on vous regarde de près on comprend tout de suite… vous représentez le fameux oiseau de la Poste stylisé façon Miro, avec des formes très simples et beaucoup d’aplats de couleur
LE TIMBRE DE MIRO : Oui, c’est vrai… Il paraît que ça ne saute pas aux yeux du premier coup, mais je représente bien le petit oiseau de la Poste… L’Oiseau flèche comme on l’appelle. A l’époque ça n’était pas plus évident… vous savez, il n’a été créé qu’en 1960 ce petit logo, il avait fallu toute une campagne d’affichage pour associer cet oiseau aux postes et télécommunications !
LAETITIA : C’était une contrainte fixée par la Poste à Miro que de réinterpréter le logo de la Poste ?
LE TIMBRE DE MIRO : Pas du tout, il avait carte blanche. Mais ce n’est pas qu’un logo ! C’est un oiseau ! Et l’oiseau, c’est le symbole de la liberté. Vous savez comme Joan était attaché à sa liberté, dans son travail. Son idée, c’est que le peintre devait être complètement libre d’imaginer ce qu’il veut. C’est pour ça que tout au long de sa carrière, il s’est détaché de la perspective, et puis de la profondeur, des dimensions.
JULIEN : Il disait d’ailleurs que pour lui, un brin d’herbe a plus d’importance qu’un arbre, une petite libellule a autant d’importance qu’un aigle.**
LE TIMBRE DE MIRO : Oui ! Et tout ça c’était pour être libre. Alors l’oiseau, c’est aussi un beau symbole de liberté.
LAETITIA : Mais ça ne l’ennuyait pas de se retrouver associé de la sorte à une marque ?
LE TIMBRE DE MIRO : Je ne crois pas non. Vous savez, c’est moins le cas aujourd’hui, mais à l’époque où j’ai été créé, les grands artistes contemporains travaillaient allègrement pour la pub. Il fallait bien gagner sa vie ! Dali a dessiné le logo de Chupa Chups, Warhol a fait des affiches pour Perrier… Et puis regardez aujourd’hui, Jeff Koons qui crée des sacs pour Louis Vuitton. Joan, lui, il a fait des affiches pour la coupe du monde de foot en Espagne… il a même dessiné le logo d’une banque espagnole ! Alors non, je ne crois pas que ça le gênait !
JULIEN : Alors vous pouvez nous en dire un peu plus sur votre genèse ? Comment Miro en est arrivé à créer un timbre comme vous ? C’est la Poste qui a fait la demande ?
LE TIMBRE DE MIRO : Exactement. Je suis le premier d’une série philatélique initiée par la Poste dans ces années-là, la Série Artistique. Joan est le premier à qui les PTT ont passé commande pour un timbre original.
JULIEN : Ca n’avait jamais été fait avant ?
LE TIMBRE DE MIRO : Non. Ce n’était pas possible techniquement ! Il existait une série artistique, mais elle n’était composée que de reproductions de qualité assez variable. Au musée de la Poste, on m’a expliqué que jusqu’au début des années 60, la technique qui permettait de reproduire les timbres donnait un rendu assez moyen, vous voyez peut-être ces timbres avec des dessins très fins mais des couleurs pastels… c’était ce qu’on appelait la gravure taille douce. Et moi, je suis l’un des premiers timbres réalisés en héliogravure…
LAETITIA : C’est-à-dire ?
LE TIMBRE DE MIRO : C’est une technique de gravure plus moderne, qui est apparue à la Poste au début des années 70, et qui permettait de reproduire des couleurs vives. C’est en découvrant cette technique que la Poste a pensé proposer à des artistes contemporains de travailler pour eux !
JULIEN : Et Miro fut donc le premier…
LE TIMBRE DE MIRO : Voilà ! Après moi beaucoup d’autres ont eu carte blanche, comme Arman, …
JULIEN : Eh bien merci à vous, cher timbre de Miro. Vous qui avez fait le tour du monde, je vais suivre votre exemple à partir de la semaine prochaine !